Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/235

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me l’a enlevé, et ce qu’on en a fait ! — Allons donc, » dit le porte-clefs en essayant de se dégager de ses mains, dont elle le tenait fortement serré ; « c’est me prendre au mot, et devant un témoin, encore. Votre enfant, dites-vous ? et comment diable saurais-je quelque chose de votre enfant, ma chère ? Il faut en demander des nouvelles à la vieille Meg Murdockson, s’il est vrai que vous n’en sachiez rien vous-même. »

À cette réponse, qui détruisait l’espoir vague et soudain qui était venu frapper la pauvre prisonnière, elle laissa aller le pan de l’habit de Ratcliffe et tomba la face contre le pavé de la chambre, dans un violent accès de convulsions.

Jeanie joignait à son excellent jugement l’avantage d’une présence d’esprit qui ne l’abandonnait jamais, même dans les plus douloureuses circonstances. Elle ne se laissa donc pas abattre par tant de sensations amères, mais s’occupa immédiatement de secourir sa sœur en employant les premiers remèdes que le lieu pût lui offrir ; et pour rendre justice à Ratcliffe, nous dirons qu’il s’empressa de les lui procurer lui-même. Il eut même la délicatesse de se retirer dans le coin le plus éloigné de la chambre pour les gêner le moins possible par sa présence jusqu’à ce qu’Effie fût assez calme pour reprendre sa conversation avec sa sœur.

Elle recommença, d’une voix émue et suppliante, à la conjurer de lui raconter les détails de sa conférence avec Robertson ; et Jeanie sentit qu’elle n’avait pas le courage de lui refuser cette satisfaction.

« Vous rappelez-vous, dit-elle à Effie, le temps où vous aviez la fièvre avant de quitter Woodend, et combien votre mère, qui est maintenant dans un meilleur monde, me gronda de vous avoir donné à boire de l’eau et du lait, parce que vous aviez pleuré pour en avoir ? Vous n’étiez qu’un enfant alors, et maintenant que vous êtes une femme, vous devriez avoir assez de raison pour ne pas demander ce qui peut vous nuire. Mais, allons, quoi qu’il en soit, je ne puis rien vous refuser de ce que vous demandez ainsi avec larmes. »

Effie se jeta de nouveau dans ses bras, lui baisa les joues et le front en murmurant : « Oh ! si vous saviez combien il y a de temps que je n’ai entendu prononcer son nom ! si vous saviez tout le bien que cela me fait d’apprendre quelque chose de lui qui prouve sa bonté, sa tendresse pour moi ! Ah ! si vous le saviez, vous ne vous étonneriez pas de mes vives instances. »