Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/237

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ma vie ! dit Jeanie. — Oui, oui, ma sœur, reprit Effie, cela est bientôt dit, mais cela n’est pas sitôt cru de quelqu’un qui ne veut pas dire un mot pour moi ; car si ce mot est une faute, vous aurez tout le temps de vous en repentir. — Mais ce mot est un grand péché, et un péché d’autant plus grave qu’il serait commis volontairement et avec préméditation. — C’est bon ! c’est bon ! Jeanie, j’en ai assez entendu au sujet des péchés volontaires ; ne parlons plus de cela et ménagez vos poumons pour dire vos prières : quant à moi, je ne serai bientôt plus en état d’en faire à personne. — Je dois dire, s’écria Ratcliffe, qu’il est diablement dur, quand trois mots de votre bouche mettraient la pauvre fille dans le cas d’échapper à la potence, que vous vous fassiez tant de scrupule pour un serment. Diable m’emporte ! si cela dépendait de moi, je jurerais de la vérité de toutes les fables d’Ésope pour lui sauver la vie. Parbleu ! j’ai bien souvent juré à moins. J’ai baisé plus de cinquante fois l’Évangile, en Angleterre, à propos d’un tonneau d’eau-de-vie. — N’en parlons plus, dit la prisonnière ; laissons les choses comme elles sont. Adieu ! ma sœur, ne retenez pas plus long-temps M. Ratcliffe. Vous reviendrez me voir, j’espère, avant que… » Ici elle s’arrêta et devint pâle comme la mort.

« Et est-ce ainsi que nous devons nous séparer, dit Jeanie, quand je vous laisse dans un si mortel péril ? Ô Effie ! regardez-moi, dites-moi ce que vous voulez que je fasse, et je crois que je trouverai dans mon cœur assez de force pour y consentir. — Non, Jeanie, » dit Effie avec effort, « non, je suis revenue à la raison maintenant. Même avant d’avoir failli, je n’ai jamais valu la moitié autant que vous ; et pourquoi démentiriez-vous votre caractère pour une créature qui ne mérite plus d’être sauvée ? Dieu sait que, quand j’ai la tête à moi, je ne voudrais pas qu’aucun être vivant commît une faute pour racheter ma vie. J’aurais pu fuir de cette prison, pendant cette nuit terrible où elle fut forcée, avec quelqu’un qui m’aurait servi de protecteur et d’appui dans le monde, mai j’ai répondu : « Que m’importe l’existence à présent que mon honneur est perdu ? » Cependant ce long emprisonnement a abattu mon courage, et il y a des fois où, abandonné à moi-même, j’éprouve quelque chose d’affreux : il me semble alors que je donnerais des mines d’or et de diamants, si je les avais, pour acheter la vie, seulement le souffle de la vie. Oui, Jeanie, je crois que j’ai quelquefois des accès de délire semblables à ceux que j’avais pendant ma fièvre ; seulement au lieu de voir, tout à l’en-