Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 27, 1838.djvu/46

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encore vassal du roi anglais pour le Lothian, pour la ville de Berwick et pour toutes les terres qu’il possédait en outre dans l’enceinte des possessions anglaises. Le retour dont l’Écosse devait payer cette ample restitution de sa liberté nationale, fut fixé à dix mille marcs sterling, somme qui équivaut environ à deux millions cinq cent mille francs d’aujourd’hui.

Les motifs qui décidèrent Richard à renoncer aux avantages que son père avait obtenus lors du malheur de Guillaume, sont aisés à comprendre. — D’abord, Richard, doué d’un caractère généreux, se rappela sans doute que l’invasion du Northumberland et la bataille d’Alnwick eurent lieu à la suite d’un traité entre Guillaume et lui-même ; il put donc se croire obligé en honneur à réparer, dans l’intérêt de son allié, une partie au moins des fâcheuses conséquences qui avaient suivi sa malheureuse tentative de mettre à effet leurs conventions. C’était, à coup sûr, un argument que des monarques d’un naturel égoïste n’eussent été que peu disposés à admettre, mais auquel Cœur-de-Lion, avec ses nobles et chevaleresques idées, ne devait pas rester insensible. — Ensuite, comme Richard allait s’embarquer pour la Terre-Sainte, une forte somme d’argent était plus importante pour lui qu’un stérile droit d’hommage, qui jamais, en effet, ne pouvait avoir pour un monarque anglais de valeur réelle et distincte, à moins qu’il ne se présentât une circonstance favorable d’y joindre un titre à la possession, aussi bien qu’à la pure suprématie du royaume d’Écosse. — En troisième lieu, il était de la dernière nécessité que le roi anglais, partant pour une lointaine expédition avec la fleur de ses troupes, laissât sur sa frontière un belliqueux voisin plutôt dans la position d’un allié reconnaissant que d’un farouche et mécontent vassal, désireux de saisir la première occasion de briser ses fers féodaux par un acte de violence semblable à celui par lequel on l’en avait chargé.

La somme stipulée pour le rachat de l’indépendance nationale d’Écosse fut réunie au moyen d’un subside que la noblesse et le clergé accordèrent au roi ; et il y a toute raison de croire que, en partie du moins, le fardeau retomba sur les habitants en forme de capitation. Deux mille marcs demeuraient dus, quand Richard lui-même tomba captif, et furent payés par Guillaume pour servir à la rançon du prince, si même, ce qui semble également probable, cette somme ne fut pas une généreuse et gratuite contribution de la part du roi écossais à la délivrance de son bienfaiteur.