Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/110

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

laps de temps des aumônes furent distribuées aux pauvres, des secours administrés par l’ordre de lady Éveline à tous ceux qui avaient eu à souffrir du dernier ravage causé par les Gallois. Un festin, appelé banquet funéraire, fut aussi donné en l’honneur du défunt ; mais la fille de Raymond et la plupart des gens de sa suite observèrent strictement le jeûne et les veilles, ce qui paraissait aux Normands plus noble et plus respectueux envers les morts que la coutume des Saxons et des Flamands, qui consistait à se livrer aux excès de la table.

Cependant le connétable de Lacy conservait sous les murs de Garde-Douloureuse un corps considérable de ses troupes pour le défendre contre quelque nouvelle irruption des Gallois ; avec ce qui lui restait de soldats il sut profiter de la victoire, et frappa de terreur les vaincus par des incursions, qui avaient pour résultat des ravages presque aussi funestes que ceux commis auparavant par les Gallois. Parmi ces derniers, les maux de la discorde s’étaient joints à ceux que leur avait causés leur défaite. Deux proches parents de Gwenwin se disputaient le trône laissé vacant par la mort de ce prince ; et dans cette occasion comme dans beaucoup d’autres, les Gallois souffraient autant de leurs dissensions intestines que du glaive des Normands. Un politique moins adroit, un capitaine moins illustre que le sage et heureux de Lacy, n’eût pas manqué, dans de telles conjonctures, de négocier une paix avantageuse, qui, privant la principauté de Powys d’une partie de ses frontières et de la possession de quelques passages importants où le connétable se proposait de faire bâtir des forts, aurait donné au château de Garde-Douloureuse les moyens de résister aux soudaines attaques de leurs voisins turbulents et belliqueux.

De Lacy s’occupa aussi de rétablir dans leur domicile tous ceux qui avaient fui leurs foyers, et de mettre toute la seigneurie, échue à une femme sans protecteur, dans un état de défense aussi parfait que pouvait le permettre sa situation sur une frontière ennemie.

Tandis qu’il veillait avec sollicitude aux intérêts de l’orpheline de Garde-Douloureuse, de Lacy ne chercha point à troubler sa douleur filiale. Mais chaque matin son neveu se rendait par ses ordres auprès d’elle, afin de présenter à Éveline, dans le langage ampoulé de l’époque, les devoirs du connétable, et lui faire connaître les diverses opérations qu’exigeait l’intérêt de ses domai-