Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/215

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

je pourrais confier la garde de sa personne et celle de la forteresse. Si je choisis un chevalier de renom, ainsi que j’en ai plusieurs dans ma maison, il voudra exercer quelque despotisme sur les Gallois, et s’engagera dans des troubles qui rendront précaire la sûreté du château ; ou bien il s’absentera pour des fêtes chevaleresques, des tournois et des parties de chasse ; ou peut-être il donnera des fêtes de ce genre frivole sous les murs, ou même dans les cours du château, faisant de la demeure tranquille et retirée qui convient à la suite de lady Éveline, un lieu de festins et de dissolution. Je puis me fier à toi ; tu combattras quand il le faudra, et tu ne provoqueras pas le danger pour l’amour du danger même. Ta naissance, tes habitudes te feront éviter ces plaisirs qui, quoique attrayants pour d’autres, ne peuvent être qu’indifférents pour toi ; ta conduite sera régulière, et j’aurai soin qu’elle te soit honorable ; ta parenté avec sa favorite Rose te rendra plus agréable à lady Éveline que peut-être quelqu’un de son rang ; et pour te parler un langage que ta nation comprend facilement, la récompense, Flamand, si tu t’acquittes régulièrement de cette importante mission, sera au-delà de toutes tes espérances. »

Le Flamand avait écouté la première partie de ce discours avec une surprise à laquelle succéda une profonde réflexion. Ses yeux restèrent fixés sur la terre après que le connétable eut cessé de parler, puis les levant tout à coup, il dit : « Il est inutile de chercher des détours et des excuses, cela ne peut pas être sérieux ; mais s’il en est ainsi, le plan est nul.

— Comment et pourquoi ? » demanda le connétable avec surprise et mécontentement.

« Un autre pourrait profiter de votre bonté et vous laisser la chance du hasard ; mais je suis un franc marchand ; je ne veux pas recevoir les honoraires d’un service que je ne puis rendre.

— Mais je demande, encore une fois, pourquoi tu ne peux pas, ou plutôt tu ne veux pas accepter cette place de confiance ? dit le connétable. Certes, si je consens à te l’accorder, il est bien de ton devoir d’y répondre.

— C’est vrai, milord, dit le Flamand ; mais il me semble que le noble lord de Lacy doit sentir, que le sage lord de Lacy doit prévoir, qu’un tisserand flamand n’est pas un gardien convenable pour sa fiancée… Supposez-la renfermée dans ce château solitaire, sous une protection aussi respectable, et réfléchissez combien de temps le lieu sera désert dans cette terre d’amour et d’aventures !