Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/327

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mon ami ? » Il le releva avec beaucoup de bonté, l’embrassa, et continua : « Ne crois pas, mon cher neveu, que j’aie eu l’intention par ce déguisement d’éprouver ton amitié dont je n’ai jamais douté ; mais les mauvaises langues avaient causé, et c’est ce qui m’a décidé à cette épreuve dont le résultat, ainsi que je m’y attendais, a été des plus honorables pour toi, et sache (car ces murs ont quelquefois des oreilles c’est à la lettre) qu’il y a des oreilles et des yeux peu éloignés qui ont tout vu et tout entendu. Néanmoins je voudrais que ton dernier coup n’eût pas été si fort : mes côtes sentent encore l’empreinte de tes doigts.

— Mon cher et digne oncle, dit Damien, excusez…

— Il n’y a rien à excuser, » reprit son oncle en l’interrompant ; « n’avions-nous pas déjà lutté ensemble ? Mais tu as encore une épreuve à subir. Sors de ce trou promptement ; habille-toi de ton mieux pour me suivre à l’église, car il faut que tu sois présent au mariage de lady Éveline Berenger. »

Cette proposition foudroya l’infortuné jeune homme. « Par miséricorde, s’écria-t-il, excusez-moi, mon cher oncle ! J’ai été sérieusement blessé dernièrement, et je suis encore très faible.

— Comme mes côtes le prouvent, dit son oncle. Comment ! drôle, tu es aussi fort qu’un ours de Norwége.

— La colère, reprit Damien, pouvait me donner de la force pour le moment ; mais, mon cher oncle, demandez-moi toute autre chose que celle-ci. Il me semble que si j’ai commis quelque faute, quelque autre punition suffirait.

— Je te dis, reprit le connétable, que ta présence est nécessaire ; indispensablement nécessaire. D’étranges bruits ont couru, et ton absence en ce moment les confirmerait. L’honneur d’Éveline y est intéressé.

— S’il en est ainsi, dit Damien, s’il en est vraiment ainsi, aucune tâche ne me sera pénible ; mais j’espère que, dès que la cérémonie sera finie, vous ne me refuserez pas la permission de prendre la croix, à moins que vous ne préfériez que j’aille rejoindre les troupes destinées, comme je l’ai entendu dire, à conquérir l’Irlande.

— Oui, oui, dit le connétable ; si Éveline t’en donne la permission, je ne te refuserai pas la mienne.

— Mon oncle, » dit Damien un peu sévèrement, « vous ne connaissez pas les sentiments dont vous plaisantez.