Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/332

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besoin ; si les belles baronnies de Bradwardine et de Tully-Veolan, avec les châteaux et les fermes qui en dépendent… (il ne manquait pas de sangloter à chaque pause) avec champs, prés, marais, moulins… terres en clos et hors clos… bâtiments, granges, pigeonniers… avec droit de pêche à la ligne et au filet dans les étangs et rivières de Veolan… avec église, cure et presbytère… tenants et aboutissants… droits de pâture… chauffage, nourriture et boisson… fermages, arrérages et redevances… (là, il eut recours au bout de sa longue cravate, car il pleurait à chaudes larmes, et malgré lui, aux idées qu’évoquait le jargon technique)… lesquels biens sont désignés plus au long dans les titres et contrats… et situés dans la paroisse de Bradwardine et dans le comté de Perth… Si, dis-je, tous ces biens passent, non à la fille de mon maître, mais à Inch-Grabbit, qui est whig et Hanovrien, et sont confiés aux soins de son homme d’affaires, Jamie Howie, qui n’est pas capable d’être garde-chasse, et encore moins bailli… »

Le commencement de cette jérémiade avait réellement quelque chose de touchant, mais la fin fit éclater un rire général. « N’ayez point peur, bailli, dit l’enseigne Maccombich, le bon vieux temps du trouble et du désordre est revenu, et Sneckus Mac Snackus (désignant sans doute les arrérages et les fermages) ainsi que vos autres amis, s’enfuiront devant la plus longue claymore. »

Et cette claymore sera la nôtre, bailli, » dit le chef envoyant Mac Wheeble pâlir à ces mots ;


« Nous leur donnerons en paiement
Le seul métal de nos montagnes ;
Au lieu de pièces d’or et de pièces d’argent,
Des claymores seront leurs fidèles compagnes.
Bientôt nous serons délivrés
Des créanciers et des créances ;
Car, de nos glaives déchirés,
Les créanciers doubleront les cadences. »


« Mais voyons, bailli, point de chagrin ; videz gaiement votre verre ; le baron retournera vivant et victorieux à Tully-Veolan, il réunira même les domaines de Killancureit aux siens, puisque le lâche pourceau qui les possède ne viendra pas, en gentilhomme, défendre le prince. »

« Pour sûr, les deux domaines sont voisins, dit le bailli en s’essuyant les yeux ; et ils dépendraient tout naturellement de la même administration. »