Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/281

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deen, si ma mémoire ne me trompe pas) il y a un officier qui veille à l’exécution de ces dispositions qui intéressent le public ; à cause de quoi on le nomme le maître des mortifications. Je supposerais volontiers que cette qualification prend son origine dans l’effet que des dispositions de cette nature produisent ordinairement sur les héritiers naturels de ceux qui les ont faites. Quoi qu’il en soit, grande fut la mortification de la compagnie qui, dans le parloir de feu Marguerite Bertram, entendit cette surprenante destination du domaine de Singleside. Un profond silence succéda à la lecture du testament.

M. Pleydell prit le premier la parole. Il demanda à voir le testament, et ayant reconnu qu’il était en bonne forme, il le rendit sans aucune observation, se contentant de dire tout bas à Mannering : « Protocole est aussi honnête qu’un autre, à ce que je crois. Mais la vieille dame a arrangé les affaires de telle façon que, s’il ne devient pas fripon, ce ne sera pas faute d’être tenté. »

« Je pense réellement, » dit M. Mac-Casquil de Drumquag, qui ayant avalé, comme on dit, la moitié de son désappointement, était résolu à donner carrière à l’autre moitié ; « je pense réellement que tout ceci est bien extraordinaire. Je voudrais maintenant savoir de monsieur Protocole qui, étant seul fidéi-commissaire, et avec des pouvoirs illimités, doit avoir été consulté dans cette affaire, je voudrais, dis-je, savoir comment mistress Bertram pouvait croire à l’existence d’un enfant que tout le monde sait avoir été assassiné il y a plusieurs années. — Réellement, monsieur, répliqua M. Protocole, je ne pourrais vous expliquer ces motifs plus qu’elle ne l’a fait elle-même. Feu notre excellente amie était une bonne femme, monsieur… une pieuse femme… elle peut avoir eu, pour croire à l’existence de cet enfant, des raisons impénétrables pour nous, monsieur. — Laissons cela, dit le débitant de tabac, je connais parfaitement les raisons. Voilà Rébecca (la femme de chambre) qui m’a dit cent fois dans ma boutique, que personne ne savait comment sa maîtresse arrangerait ses affaires, parce qu’une vieille sorcière de Bohémienne de Gilsland lui avait fourré dans la tête que le jeune… c’est Henri Bertram qu’on l’appelait, je crois… reviendrait, bien portant, quelque jour… Soutiendrez-vous le contraire, miss Rébecca ?… quoique j’ose dire que vous avez oublié de rappeler à votre maîtresse ce que vous me promettiez de lui dire, quand je vous donnais une demi-couronne, ce qui est arrivé plus d’une fois. Nierez-vous ce que j’avance ? — Je ne sais rien de tout