Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/343

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

étoiles cette nuit, et de faire tout ce que je lui marque dans cette lettre, s’il désire

Que de Bertram le droit et la puissance
D’Ellangowan atteigne l’éminence.


Je l’ai vu deux fois sans qu’il me vît. Je sais quand il est venu en ce pays pour la première fois… Je sais aussi quel motif l’y ramène. Allons ! sortez ! Vous êtes resté assez long-temps ; suivez-moi. »

Sampson se leva donc, et suivit la sibylle qui le conduisit un quart de mille environ à travers les bois par un chemin plus court et qu’il ne connaissait pas. Ils arrivèrent bientôt dans la plaine. Meg Merrilies continua de marcher à grands pas devant lui, jusqu’à ce qu’elle fût arrivée au haut d’une petite éminence qui dominait la route.

« Là, dit-elle, arrêtez-vous là. Regardez comme le soleil couchant perce ce nuage qui l’a caché tout le reste du jour ; voyez le lieu sur lequel tombent ses rayons… c’est la tour de Donagild… la plus vieille tour du château d’Ellangowan… ce n’est pas pour rien !… Voyez comme il fait noir vers la mer, là, derrière cette chaloupe qui est dans la baie… ce n’est pas non plus pour rien… C’est ici même, » dit-elle en se redressant de manière à ne point perdre l’épaisseur d’un cheveu de sa taille extraordinaire, et en étendant son long bras nerveux et sa main desséchée ; « c’est ici que j’ai prédit au dernier laird d’Ellangowan ce qui devait arriver à sa maison. Mes paroles sont-elles tombées à terre ?… non… elles se sont accomplies à la lettre, et mieux encore !… C’est ici que j’ai rompu la baguette de paix avec lui… Je m’y arrête aujourd’hui pour demander à Dieu de bénir et de protéger l’héritier légitime d’Ellangowan qui va rentrer dans tous ses biens ; et il sera le meilleur laird qu’Ellangowan ait eu depuis trois cents ans… Je ne vivrai point assez pour le voir, peut-être ; mais assez d’yeux le verront quand les miens seront fermés. Et maintenant, Abel Sampson, si vous avez jamais aimé la famille d’Ellangowan, portez mon message au colonel anglais, comme si la vie et la mort dépendaient de votre diligence. »

À ces mots, elle tourna tout-à-coup le dos à Dominie, et regagna à grands pas, mais avec un air de dignité et par le plus court chemin, les bois d’où ils venaient de sortir. Sampson, stupéfait, la suivit un moment des yeux, puis se dirigea avec une vitesse extraordinaire vers le château de Woodbourne, pour remplir la commission