Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/409

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encore auparavant, répondit l’autre. Je dois connaître la figure d’un Ellangowan. »

« Moi et les miens, nous y sommes depuis trois cents ans, ajouta un troisième ; et je vendrais jusqu’à ma dernière vache pour voir le jeune laird rétabli dans ses droits. »

Les femmes, qui aiment toujours les aventures romanesques, surtout quand un beau jeune homme en est le héros, joignirent leurs voix perçantes à la clameur générale… « Bénédiction sur lui ! c’est le portrait de son père… Les Bertram ont toujours été les protecteurs du pays. »

« Ah ! pourquoi sa pauvre mère, qui est morte du chagrin de l’avoir perdu, n’a t-elle pas vécu jusqu’à ce jour ! » s’écriaient quelques voix de femmes.

« Oui, disaient d’autres, oui, nous l’aiderons à rentrer dans ses biens ; et si Glossin veut rester en possession du château d’Ellangowan, nous l’en chasserons avec nos ongles. »

D’autres formaient un cercle autour de Dinmont, qui n’était pas eu reste de raconter ce qu’il savait de son ami, et de se glorifier de l’honneur qu’il avait eu de contribuer à le faire reconnaître pour ce qu’il était. Comme il était connu des principaux fermiers, son témoignage vint accroître l’enthousiasme général. En un mot, c’était un de ces moments d’émotion entraînante, où la froideur écossaise se fond comme la neige, et où le torrent débordé emporte dans sa course digues et écluses.

Ces clameurs soudaines interrompirent les prières du ministre ; et Meg, qui était dans un de ces accès d’assoupissement léthargique qui précèdent la fin de la vie, se réveilla en sursaut : « Entendez-vous ?… entendez-vous ?… il est reconnu, il est reconnu ! je ne vivais plus que pour cela… Je ne suis qu’une pécheresse ; mais si ma malédiction a attiré le malheur sur lui, ma bénédiction l’en a éloigné. Et maintenant, je voudrais en avoir dit davantage ; mais cela ne se peut. Un moment, » continua-t-elle en tournant la tête vers la faible clarté qui pénétrait dans la chambre à travers une petite ouverture qui tenait lieu de fenêtre, « n’est-il pas ici ? retirez-vous du jour ; laissez-moi le voir une fois encore. Mais les ténèbres sont dans mes yeux, » ajouta-t-elle en tombant à la renverse après avoir lancé un dernier regard qui se perdit dans le vide… « C’est fini : maintenant,

Esprit, va-t’en ;
Mort, approche. »