Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/411

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Bertram accepta volontiers le cheval, mais à titre de prêt, et remercia ces bons villageois des marques d’attachement qu’il avait reçues d’eux, leur promettant en échange son amitié et sa bienveillance.

Pendant que l’heureux propriétaire du cheval envoyait un enfant chercher la selle neuve, un autre pour bien bouchonner la bête avec du foin sec, un troisième pour emprunter à Dan Dukieson ses étriers argentés, et qu’il exprimait ses regrets de ce qu’on n’avait pas le temps de faire manger sa bête, pour que le jeune laird pût connaître tout ce qu’elle valait, Bertram prit le ministre par le bras, entra avec lui dans la tour, et en ferma la porte. Il fixa un moment les yeux, en silence, sur le corps de Meg Merrilies, dont les traits, quoique rendus plus sombres par la mort, conservaient encore cette expression d’autorité et d’énergie qui l’avait rendue, pendant sa vie, la dominatrice de la tribu errante dans laquelle elle était née. Le jeune officier essuya les larmes qui coulaient involontairement de ses yeux à la vue des restes de cette femme, victime volontaire de son dévoûment et de sa fidélité envers lui et envers sa famille. Prenant la main du ministre, il lui demanda d’un ton solennel si elle lui avait paru en état de donner à ses prières l’attention qui convient à une personne mourante.

« Mon cher monsieur, répondit celui-ci, j’espère que cette pauvre femme avait encore assez de connaissance pour comprendre mes prières, et pour s’y associer. Mais confions-nous humblement dans la pensée que nous serons jugés d’après nos connaissances religieuses et morales. On peut, en quelque sorte, considérer cette femme comme une païenne ignorante au milieu d’un pays chrétien ; souvenons-nous que les fautes et les erreurs d’une vie passée dans les ténèbres de la foi ont été rachetées par des traits de désintéressement et d’affection qui sont allés jusqu’à l’héroïsme. Abandonnons-la avec crainte, mais non sans espérance, à celui qui, seul, peut faire entrer en balance nos crimes et nos erreurs avec nos efforts vers la vertu.

— Puis-je vous prier, demanda Bertram, de veiller à ce que les funérailles de cette pauvre femme soient faites d’une manière convenable ? J’ai dans les mains différents effets qui lui appartiennent ;