Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/44

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consulter les influences et les conjonctions cachées des astres, les avait élevés au-dessus du reste de leurs semblables.

Parmi ceux qui chérissaient ce privilège imaginaire avec une foi qui n’admettait aucun doute, était un vieil ecclésiastique sous lequel Mannering avait été placé dans sa jeunesse ; il usait ses yeux à observer les astres, et sa cervelle à calculer leurs diverses combinaisons. Son élève, dans ses premières années, prit naturellement une partie de son enthousiasme et travailla pendant quelque temps pour acquérir les connaissances techniques propres à le mettre à même de faire des recherches astrologiques ; et avant qu’il se fût convaincu de l’absurdité de cet art, William Lilly lui-même lui aurait accordé une imagination investigatrice et un jugement perçant, et assez de talent pour tirer un horoscope.

Dans l’occasion présente, il se leva aussi matin que la brièveté des jours le lui permit, et se disposa à calculer le thème de nativité du jeune héritier d’Ellangowan. Il entreprit cette tâche secundum artem, aussi bien pour sauver les apparences, que par une sorte de curiosité qui le portait à savoir s’il se rappellerait et pourrait pratiquer cette science imaginaire. En conséquence, il dressa la figure du ciel, le divisa en ses douze maisons, y plaça les planètes selon les éphémérides, et fit cadrer leur position avec l’heure et le moment de la naissance. Sans parler à nos lecteurs des pronostics généraux que l’astrologie judiciaire aurait tirés de ces circonstances, il y avait dans cet horoscope un signe qui fixa d’une manière remarquable l’attention de notre astrologue : Mars étant au plus haut dans le coin de la douzième maison, menaçait l’enfant de captivité, ou de mort violente et subite ; et Mannering ayant eu recours à ces règles plus savantes au moyen desquelles les devins prétendent s’assurer de la force de cette mauvaise position, trouva par le résultat que les trois périodes particulièrement fatales étaient la cinquième, la dixième et la vingt et unième année.

Il est bon de noter que Mannering avait déjà une fois auparavant essayé la même folie à la prière de Sophie Wellwood, la jeune dame à laquelle il était attaché, et qu’il avait trouvé qu’une semblable conjonction des planètes la menaçait, par son influence, de mort ou d’emprisonnement dans sa trente-neuvième année. Elle avait alors dix-huit ans ; ainsi donc, d’après le résultat de l’horoscope dans les deux cas, la même année la menaçait du même malheur présagé à l’enfant qui venait d’entrer cette nuit dans le monde. Frappé de cette coïncidence, Mannering répéta ses calculs, et le