Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/53

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ture ; mes poules sont toujours en bien mauvais état, Luckie Finniston m’en a envoyé trois la semaine dernière qui faisaient honte à voir, et cependant elle a douze bows en semence pour les nourrir ; en vérité, son mari, Duncan Finniston… il est parti de ce monde. Nous devons tous mourir, monsieur Mannering, c’est une grande vérité, et en parlant de mourir, vivons en attendant, car voici le déjeuner sur la table, et Dominie prêt à dire le benedicite. »

Dominie prononça donc une prière qui excédait en longueur toutes les paroles que Mannering lui avait entendu dire jusqu’ici. Le thé, qui venait naturellement de la cargaison du noble capitaine Hatteraick, fut déclaré excellent. Mannering fit entendre, mais avec la délicatesse convenable, le danger qu’il y avait à encourager des hommes d’un tel caractère ; « ce ne serait que dans l’intérêt de l’excise que je supposerais… — Ah ! les gens de l’excise ; » car M. Bertram n’embrassait jamais une idée abstraite ou générale, et dans son esprit considérait comme étant l’excise, les commissionnés, les surveillants, les contrôleurs, les officiers à cheval qu’il connaissait ; « les gens de l’excise peuvent faire attention à eux, personne n’a besoin de les secourir, ils ont des soldats pour les assister ; et quant à la justice, vous serez surpris de ce que je vais vous dire, monsieur Mannering : croiriez-vous que je ne suis pas juge de paix ? »

Mannering affecta l’air d’étonnement qui lui était ainsi prescrit, mais il pensa en lui-même que l’honorable tribunal n’était pas beaucoup à plaindre d’être privé du secours de son joyeux hôte. M. Bertram était maintenant sur un des sujets peu nombreux qui lui tenaient au cœur, et il poursuivit avec quelque énergie.

« Non, monsieur, le nom de Godefroy Bertram d’Ellangowan n’est point inscrit sur la liste des membres du dernier tribunal, quoiqu’il y ait à peine un rustre dans le pays ayant assez de temps pour employer une charrue qui ne puisse se rendre aux sessions trimestrielles, et écrire un J. P.[1] après son nom. Je sais à qui j’en suis obligé. Sir Thomas Kittlecourt a été assez bon pour me dire qu’il m’aurait fait nommer, si je n’avais pas voté contre lui à la dernière élection : et parce que j’ai préféré donner ma voix à mon sang, à mon cousin au troisième degré, au laird de Balruddery, ils me rayèrent de la liste des francs tenanciers ; et puis vint une nouvelle nomination de juges de paix, et je fus laissé de côté. Et ils

  1. Lettres initiales signifiant juge de paix. a. m.