Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/276

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appréhension les auroit fait mourir, et nous ne serions pas en état de nous réjouir de votre guérison. Notre perte n’est pas seulement attachée à la vôtre ; une maladie, dont vous guérirez, est capable de donner véritablement la mort, à tous les sujets de votre Empire.

Si du ciel le courroux fatal
Faisoit durer encor quelques jours votre mal,
Les sujets auroient tant de peine
À voir souffrir leur belle reine,
Que chacun d’eux pourroit mourir,
Avant que vous pussiez guérir.
Je perdrois le premier la vie,
Et de cent autres morts ma mort seroit suivie :
Votre chère et fidèle Lot
Suivroit ma disgrâce bientôt ;
Vous la verriez avec des larmes
Prendre congé de tous vos charmes,
Et faire ses derniers adieux,
Baisant votre bouche et vos yeux.
« Adieu, je meurs. Adieu, Madame :
Vous possédiez mon cœur, je vous laisse mon âme,
Et trouve mon sort assez doux,
Puisque je meurs à vos genoux.
Croyez que jamais la comtesse…
La voix me manque, et je vous laisse.
Que le dernier soupir, qui va m’ôter le jour,
Est bien moins à la mort qu’il n’est à mon amour ! »
C’est ainsi que la vice-reine,
Meurt aux pieds de sa souveraine :
Jamais rien ne la sut charmer ;
Mais on trouve, à la fin, qu’on est fait pour aimer,