Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/248

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l’amitié à l’amour sans emportement, je puis revenir de l’amour à l’amitié avec aussi peu de violence. » Cependant, cet homme si complaisant, qui s’accommode si bien de tout, a poursuivi des traits inexorables de la satire, et avec une invariable persistance, la dévotion et le couvent, où se réfugioient si fréquemment alors de nobles cœurs désabusés de l’amour. Son intolérance peut s’expliquer par des résolutions qui l’ont froissé, et surtout par la crainte qu’il eut de se voir enlever, par la religion, une amie, hélas ! si bruyamment volage, Hortense Mancini, après l’affaire du chevalier de Savoie, ce neveu trop susceptible, qui, sans en être prié, tua le jeune Suédois Banier, l’amant de sa tante, pour venger un honneur que celle-ci ne croyoit point outragé. Dans l’analyse de ces déterminations extrêmes, Saint-Évremond n’écoute que sa raison sceptique, là où le cœur du désespéré agit seul et prononce. Il se peut, comme le veut Saint-Évremond, que la dévotion soit le dernier amour de la femme pénitente. Mais pourquoi lui refuser, pour ce dernier amour, la liberté que nous lui donnons pour le premier ?

Quant au couvent, il est vrai qu’il étoit devenu, en ce temps, comme la conclusion banale d’une passion affichée et d’un attachement trompé. L’entrée au cloître étoit, en ce cas, une résolution toute mondaine, et même une sorte de distinction privilégiée, à l’usage des grandes dames seulement ; elle n’eût point été permise à une femme d’un rang subalterne. Au rapport de Loret, Mlle Garnier, abandonnée par M. de Champlatreux, qui ne veut pas encore l’épouser, se retire en un couvent, en