Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/332

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moi, de plaire, par mon esprit ; j’obéis, mais voyant que je baille, et que je fais bailler les autres, je suis quelquefois prête à renoncer à la dévotion. »

C’est peu de temps après qu’elle accepta la charge d’élever, en secret, les bâtards de Mme de Montespan et du roi ; charge difficile, peu honorable, en elle-même, mais dont elle fit l’échelon d’une fortune inouïe, avec un artifice merveilleux. Jamais femme n’a déployé tant de prudence, tant d’intelligence, et tant d’ambition. Elle se fit l’instrument du parti pieux qui vouloit tirer le roi de ses désordres ; et à son tour elle fit du parti l’instrument de ses desseins et de son élévation. Heureuse si elle eût pu mettre une limite à des exigences qui ont jeté le monarque et l’État dans les extrémités les plus fatales ! Mais elle a été condamnée à tout faire, pour ceux qui avoient tout fait pour elle.

Dès l’année 1679, elle a complétement tourné à la dévotion ; mais ses lettres à Ninon sont toujours tendres, avec de bons souvenirs d’un autre temps. Elle avoit envoyé son frère prendre des exemples à la rue des Tournelles ; il en avoit besoin. « Continuez, écrit-elle à son ancienne amie, à donner de bons conseils à M. d’Aubigné. Il a bien besoin des leçons de Léontium. Les avis d’une amie aimable persuadent toujours plus que ceux d’une sœur sévère. Mme de Coulanges m’a donné des assurances de votre amitié qui m’ont bien flattée. Ce que vous entendez dire de ma faveur n’est qu’un vain bruit ; je suis étrangère dans ce pays, sans autre appui que des personnes qui ne m’aiment pas ; sans autres amis que des gens intéres-