Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/136

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vivre sous les empereurs que sous les consuls, si les maximes d’Auguste eussent été suivies. Rome ne fut pas si heureuse. La politique de Tibère fut embrassée de la plupart de ses successeurs, qui mirent l’honneur de leur règne, non pas à mieux gouverner l’empire, mais à se l’assujettir davantage.

Dans ce sentiment, Auguste fut moins estimé pour avoir su rendre les Romains heureux, que Tibère pour les avoir fait impunément misérables. Il parut à ces empereurs qu’il y avoit de l’insuffisance ou de la foiblesse à garder les lois ; et tantôt l’art de les éluder faisoit le secret de la politique, tantôt la violence de les rompre paroissoit une véritable hauteur et une digne autorité. Les forces de l’empire ne regardoient plus les étrangers : la puissance de l’empereur se faisoit sentir aux naturels ; et les Romains opprimés tinrent lieu de nations assujetties. Enfin, les Caligules, les Nérons, les Domitiens, poussèrent la domination au-delà de toutes bornes ; et, quoique les droits des empereurs fussent infiniment au-dessous de ceux des rois, ils se portèrent à des violences où n’auroit pas voulu aller Tarquin même.

Les Romains, de leur côté, devinrent également funestes aux empereurs ; car, passant de la servitude à la fureur, ils en massacrèrent quelques-uns, et s’attribuèrent un pouvoir in-