Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/176

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le dérèglement aussi bien que la contrainte ; et pour revenir à quelque sorte de régularité, je reprends la narration que j’ai commencée.

La première chose que fit la cour, à la détention de Monsieur le Prince, fut d’aller en Normandie, pour en chasser madame de Longueville, et ôter aux créatures de sa maison les gouvernements qui étoient entre leurs mains. Je fis le voyage avec M. de Candale, et deux jours entiers d’un temps et d’un chemin assez fâcheux nous eûmes une conversation presque continue, et assez agréable, pour être fort variée.

Après nous être épuisés à parler de sa passion, de celle de quelques autres, et indifféremment de tous les plaisirs, nous vînmes à tomber insensiblement sur le misérable état où se trouvoit Monsieur le Prince, avec tant de gloire et après tant de grandeur. Je lui dis : « Qu’un prince si grand et si malheureux devoit être plaint de tout le monde ; que sa conduite, à la vérité, avoit été peu respectueuse pour la reine, et un peu fâcheuse pour M. le cardinal, mais que c’étoient des fautes à l’égard de la cour et non pas des crimes contre l’État, capables de faire oublier les services importants qu’il avoit rendus ; que ces services avoient soutenu M. le cardinal et assuré le pouvoir dont Son Éminence venoit de se servir pour le