Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/179

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vous faire une confidence, poursuivit-il, que je n’ai jamais faite à personne : vous ne sauriez croire l’inclination que M. le cardinal a pour moi. Vous savez qu’il a quelque dessein de me faire épouser une de ses nièces ; et l’on croira aisément que sa bonne volonté est fondée sur le projet de cette alliance ; j’y en attribue moi-même une partie, mais je ne m’y connais point, ou il a pour moi quelque foible. Je vous confierai encore un plus grand secret : c’est que je ne me sens aucune amitié pour lui, et à vous parler nettement, j’ai le cœur aussi dur pour Son Éminence, que Son Éminence le sauroit avoir pour le reste des courtisans. »

« J’aimerois beaucoup mieux, lui dis-je, que vous eussiez quelque tendresse, car il sera difficile que vos véritables sentiments échappent à sa pénétration. Si vous m’en croyez, vous le verrez rarement en particulier ; et lorsque vous y serez obligé, entretenez-le de votre dévouement en général, sans vous laisser conduire dans un détail curieux, qui lui donne le loisir de vous examiner et la facilité de vous connoître. Quand le roi et la reine seront chez lui, quand il cherchera à se divertir avec ses courtisans ordinaires, ne manquez jamais de vous y trouver ; et là, par toutes sortes de complaisances et d’agréments, tâchez d’entretenir une amitié qu’il est assez disposé à entretenir