Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/277

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qui m’est possible pour ne pas profiter de sa lecture. Ce que je trouve de plus beau dans ses ouvrages, sont les exemples et les citations qu’il y mêle. Comme il vivoit dans une cour délicate, et qu’il savoit mille belles choses de tous les temps, il en allègue de fort agréables, tantôt de César, d’Auguste, de Mécénas : car après tout, il avoit de l’esprit et de la connoissance infiniment ; mais son style n’a rien qui me touche ; ses opinions ont trop de dureté, et il est ridicule qu’un homme qui vivoit dans l’abondance, et se conservoit avec tant de soin, ne prêchât que la pauvreté et la mort.

Sur Plutarque.

Montaigne a trouvé beaucoup de rapports entre Plutarque et Sénèque2 : tous deux grands philosophes, grands prêcheurs de sagesse et de vertu ; tous deux précepteurs d’empereurs romains. L’un, plus riche et plus élevé ; l’autre, plus heureux dans l’éducation de son disciple. Les opinions de Plutarque (comme dit le même Montaigne) sont plus douces et plus accommodées à la société ; celles de Sénèque, plus fermes selon lui, plus dures et plus austères selon moi. Plutarque insinue doucement la sagesse, et veut rendre la vertu familière


2. Voy. les Essais de Montaigne, liv. II, ch. x.