Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/278

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dans les plaisirs même. Sénèque ramène tous les plaisirs à la sagesse, et tient le seul philosophe heureux. Plutarque, naturel, et persuadé le premier, persuade aisément les autres. L’esprit de Sénèque se bande et s’anime à la vertu ; et comme si ce lui étoit une chose étrangère, il a besoin de se surmonter lui-même. Pour le style de Plutarque, n’ayant aucune connoissance du grec, je n’en saurois faire un jugement assuré : mais je vous avouerai que parmi les traités de sa morale, il y en a beaucoup où je ne puis rien comprendre, soit par la grande différence des choses et des manières de son temps à celles du nôtre, ou que véritablement ils soient au-dessus de mon peu d’intelligence. Le démon familier de Socrate, la création de l’âme, le rond de la lune3, peuvent être admirables à qui les entend. Je vous dirai nettement que je n’en connois pas la beauté ; et s’ils sont merveilleux, c’est une merveille qui me passe.

On peut juger par les bons mots des anciens qu’il nous a laissés, par ses dits qu’il ramasse avec tant de soin, par ses longs propos


3. Plutarque a fait trois petits traités, intitulés, selon la traduction d’Amyot : Du démon ou esprit familier de Socrate ; de la création de l’âme, que Platon décrit dans son Timæus ; de la face qui apparoît dedans le rond de la lune. (Des Maizeaux.)