Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/296

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blics, que les discours des ruelles. Pour moi, qui suis grand admirateur des anciens, je ne laisse pas de rendre justice à notre nation, et de croire que nous avons sur eux en ce point un grand avantage. Et sans mentir, après avoir bien examiné cette matière, je ne sache aucun de ces grands génies, qui eût pu faire parler d’amour Massinisse et Sophonisbe, César et Cléopâtre, aussi galamment que nous les avons ouï parler en notre langue21. Autant que les autres nous le cèdent, autant Pétrone l’emporte sur nous. Nous n’avons point de roman qui nous fournisse une histoire si agréable que la Matrone d’Éphèse22. Rien de si galant que les poulets de Circé et de Polyénos23; toute leur


Hélas ! Il me dévore, et mon cœur embrasé,
Déjà par sa chaleur est de force épuisé.
Et soit ! consumons-nous d’une flamme si belle,
Brûlons en holocauste au feu de la Pucelle ;
Laissons-nous pour sa gloire en cendres convertir,

Et tenons à bonheur d’en être le martyr.

La Pucelle, Liv. II, à la fin.

21. Voyez la Sophonisbe, et la Mort de Pompée, de Pierre Corneille.

22. On trouve, dans les Œuvres de Saint-Évremond, publiées, soit à Paris, soit en Hollande, une traduction en prose de ce conte de la Matrone d’Éphèse. Mais cette traduction est fort différente, dans les éditions données d’après Des Maizeaux, et dans les éditions de Barbin, ou on la trouve très-altérée. — L’imitation de la Fontaine ôtant tout intérêt à cette prose, je me suis abstenu de la reproduire ici.

23. Voy. les chapitres cxxix et cxxx du Satyricon.