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RÉPONSE DE M. DE SAINT-ÉVREMOND À M. DE CORNEILLE.

Monsieur,

Je ne doute pas que vous ne fussiez le plus reconnoissant homme du monde d’une grâce qu’on vous feroit, puisque vous vous sentez obligé d’une justice qu’on vous rend. Si vous aviez à remercier tous ceux qui ont les mêmes sentiments que moi de vos ouvrages, vous devriez des remerciements à tous ceux qui s’y connoissent. Je vous puis répondre que jamais réputation n’a été si bien établie que la vôtre, en Angleterre et en Hollande. Les Anglois, assez disposés naturellement à estimer ce qui leur appartient, renoncent à cette opinion souvent bien fondée, et croient faire honneur à leur Benjamin Johnson1, de le nommer le Corneille d’Angleterre. M. Waller, un des plus beaux esprits du siècle, attend toujours vos pièces nouvelles, et ne manque pas d’en


1. Benjamin Johnson (ou Ben Jonson), célèbre poëte anglois, fleurissoit sous les règnes de la reine Élisabeth, de Jacques Ier et de Charles Ier. Comme il étoit versé dans la lecture des anciens, il en profita habilement, et donna au théâtre anglois une forme et une régularité qu’il n’avoit point eu jusqu’alors. Il a fait des tragédies, comme le Séjan et le Catilina, qui ont eu l’approbation des connoisseurs. Mais on estime surtout ses comédies, particulièrement celles qui ont pour titre : Volpone ou le Renard, l’Alchimiste, la Foire de la Saint-Barthélemy