Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/457

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nous attristent, et à des imaginations qui nous effraient.

Je n’ignore pas que Salomon a été blâmé de cette dernière conduite ; mais quoique sa raison parût affoiblie, il ne laissoit pas d’être sage à son égard. Il adoucissoit par là ses chagrins, flattoit ses douleurs, détournoit des maux qu’il ne pouvoit vaincre ; et la sagesse, qui ne trouvoit plus les moyens de le faire heureux, se servoit utilement de diversions, pour le rendre moins misérable. À peine commençons-nous à vieillir, que nous commençons à nous déplaire, par un dégoût qui se forme secrètement en nous de nous-mêmes. Alors notre âme, vide d’amour propre, se remplit aisément de celui qu’on nous inspire ; et ce qui n’auroit plu que légèrement autrefois, par la résistance de nos sentiments, nous charme et nous assujettit dans notre foiblesse. C’est par là que les maîtresses disposent à leur gré des vieux amants, et les femmes des vieux maris ; c’est par là que Syphax s’abandonna aux volontés de Sophonisbe, et qu’Auguste fut gouverné par Livie ; et pour ne pas tirer tous mes exemples de l’antiquité, c’est ainsi que M. de Senecterre4, digne d’être nommé avec les rois et les empereurs,


4. Père du maréchal de la Ferté. Voy. Tallemant, I, p. 224 et suiv., édit. citée.