Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/458

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par le seul mérite d’honnête homme ; c’est ainsi que ce courtisan, aussi sage que délicat et poli, se laissoit aller mollement à l’amitié d’une jeune femme, qu’il avoit épousée sur ses vieux jours. Si vous saviez, disoit-il à ses amis, quel est l’état d’un homme de mon âge, qui n’a que soi-même à se présenter dans la solitude, vous ne vous étonneriez pas que j’aie cherché une compagnie qui me plaît, à quelque prix que ce fût. Je ne l’en blâmai jamais. Comment blâmer une chose que Salomon a autorisée, par son exemple, et que M. le maréchal d’Estrées vient d’autoriser par le sien5 ? Cependant, malgré toutes ces autorités, j’estimerois beaucoup une personne qui auroit assez de force d’esprit pour conserver le goût de la liberté jusqu’à la fin de ses jours.

Ce n’est pas qu’une pleine indépendance soit toujours louable ; de ces gens si libres et si détachés, se font les indifférents et les ingrats. Évitons l’assujettissement et la liberté entière, pour nous contenter d’une liaison douce et honnête, aussi agréable à nos amis qu’à nous-mêmes. Si on me demande plus que de la chaleur et des soins, pour les intérêts de ceux que


5. Le maréchal d’Estrées épousa en troisièmes noces et à l’âge de 91 ans, Gabrielle de Longueval, fille d’Achille de L., Sr de Manicamp. Voy. son Historiette, dans Tallemant, I, p. 383 et suiv.