Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/590

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l’étendue, et la nature de la force demande déjà quelque autre chose.

Enfin, en septième lieu, je me souviens que M. Cordemoy, dans son traité du discernement de l’âme et du corps, pour sauver l’unité substantielle dans les corps, s’est cru obligé d’admettre des atomes ou des corps étendus indivisibles afin de trouver quelque chose de fixe pour faire un être simple, mais vous avez bien jugé, Monsieur, que je ne serais pas de ce sentiment. Il paraît que M. Cordemoy avait reconnu quelque chose de la vérité, mais il n’avait pas encore vu en quoi consiste la véritable notion d’une substance, aussi c’est là la clef des plus importantes connaissances. L’atome qui ne contient qu’une masse figurée d’une dureté infinie (que je ne tiens pas conforme à la sagesse divine non plus que le vide) ne saurait envelopper en lui tous ses états passés et futurs, et encore moins ceux de tout l’univers.

Je viens à vos considérations sur mon objection contre le principe cartésien touchant la quantité de mouvement, et je demeure d’accord, Monsieur, que l’accroissement de la vélocité d’un corps pesant vient de l’impulsion de quelque fluide invisible, et qu’il en est comme d’un vaisseau que le vent fait aller premièrement très peu, puis davantage. Mais ma démonstration est indépendante de toute hypothèse. Sans me mettre en peine à présent comment le corps a acquis la vitesse qu’il a, je la prends telle qu’elle est, et je dis qu’un corps d’une livre qui a une vitesse de 2 degrés a deux fois plus de force qu’un corps de deux livres qui a une vitesse d’un degré, parce qu’il peut élever une même pesanteur deux fois plus haut. Et je tiens qu’en dispensant le mouvement entre les corps qui se choquent il faut avoir égard non pas à la quantité de mouvement comme fait M. Descartes dans ses règles, mais à la quantité de la force ; autrement on pourrait obtenir le mouvement perpétuel mécanique. Par exemple, supposons que dans un carré un corps aille par la diagonale , choquer en même temps deux corps à lui égaux et , en sorte que dans le moment du choc les trois centres de ces trois sphères se trouvent dans un triangle rectangle isocèle, le tout dans un plan horizontal, supposons maintenant que le corps demeure en repos après le choc dans le lieu , et donne toute sa force aux corps et  ; en ce cas ira de en avec la vélocité et direction , et de en avec la vélocité et direction . C’est-à-dire, si avait mis une seconde du temps à venir uni-