Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/593

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gaires, ce qui est entièrement contre l’intention de M. Descartes ; outre cela, il croit que la raison, pourquoi dans le cas que j’avais propose l’un des deux corps est aussi fort que l’autre quoiqu’il ait une moindre quantité de mouvement, vient de ce que ce corps est descendu en plus de temps puisqu’il est venu d’une plus grande hauteur. Si cela faisait quelque chose, le principe des cartésiens qu’il veut défendre serait assez ruiné par cela même ; mais cette raison n’est pas valable, car ces deux corps peuvent descendre de ces différentes hauteurs en même-temps, selon les inclinations qu’on donne aux plans dans lesquels ils doivent descendre, et cependant l’objection ne laissera pas de subsister en son entier. Je souhaiterais donc que mon objection fut examinée par un cartésien qui soit géomètre et versé dans ces matières.

Enfin, Monsieur, comme je vous honore infiniment, et prends beaucoup de part à ce qui vous touche, je serai ravi d’apprendre quelquefois l’état de votre santé et les ouvrages que vous avez en mains, dont je fais gloire de connaître le prix. Je suis avec un zèle passionné, etc.


Lelbniz au Landgrave.

Tiré de ma lettre Novembre 1686.

Je prends la liberté, Monseigneur, de supplier encore votre V. A. S. qu’il lui plaise d’ordonner qu’on fasse tenir à M. Arnaud les ci-jointes ; et comme il y est traité de matières éloignées des sens extérieurs et dépendantes de l’intellection pure, qui ne sont pas agréables et le plus souvent sont méprisées par les personnes les plus vives et les plus excellentes dans les affaires du monde ; je dirai ici quelque chose en faveur de ces méditations, non pas que je sois assez ridicule pour souhaiter que V. A. S. s’y amuse (ce qui serait aussi peu raisonnable que de vouloir qu’un général d’armée s’applique à l’algèbre, quoique cette science soit très utile à tout ce qui a connexion avec les mathématiques) ; mais afin que V. A. S. puisse mieux juger du but et de l’usage de telles pensées, qui pourraient paraître peu dignes d’occuper, tant soit peu, un homme à qui tous les moments doivent être précieux. En effet, de la manière que ces choses sont traitées communément par les scolastiques, ce ne sont que disputes, que distinctions, que jeux de paroles ; mais il y a des veines d’or dans ces rochers stériles. Je mets en fait que la pensée est la fonc-