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des mots

vrages, a fait une langue dont le latin est la base, qui est plus aisée et a moins de sujétion que notre latin, mais qui est plus régulière que la Lingua Franca. Il en a fait un livre exprès. Pour ce qui est des langues qui se trouvent faites depuis longtemps, il n’y en a guère qui ne soient extrêmement altérées aujourd’hui. Cela est manifeste en les comparant avec les anciens livres et monuments qui en restent. Le vieux français approchait davantage du provençal et de l’italien, et on voit le théotisque avec le français ou romain plutôt (appelé autrefois Lingua Romana rustica) tels qu’ils étaient au neuvième siècle après Jésus-Christ dans les formules des serments des fils de l’empereur Louis le Débonnaire, que Nithard, leur parent, nous a conservés. On ne trouve guères ailleurs de si vieux français, italien ou espagnol. Mais pour du théotisque ou allemand ancien, il y a l’Évangile d’Otfried, moine de Weissenbourg de ce même temps, que Flacius a publié et que M. Schilter[1] voulait donner de nouveau. Et les Saxons passés dans la Grande-Bretagne nous ont laissé des livres encore plus anciens. On a quelque version ou paraphrase du commencement de la Genèse et de quelques autres parties de l’Histoire sainte, faite par un Caedmon, dont Beda fait déjà mention. Mais le plus ancien livre non seulement des langues germaniques, mais de toutes les langues de l’Europe, excepté la grecque et la latine, est celui de l’Évangile des Goths du Pont-Euxin, connu sous le nom de Codex argenteus, écrit en caractères tout particuliers, qui s’est trouve dans l’ancien monastère des Bénédictins de Werden, en Westphalie, et a été transporte en Suède, où on le conserve comme de raison avec autant de soin que l’original des Pandectes à Florence, quoique cette version ait été faite pour les Goths orientaux et dans un dialecte bien éloigné du germanique scandinaves : mais c’est parce qu’on croit avec quelque probabilité que les Goths du Pont-Euxin sont venus originairement de Scandinavie, ou du moins de la mer Baltique. Or la langue ou le dialecte de ces anciens Goths est très différent du germanique moderne, quoiqu’il y ait le même fond de langue. L’ancien gaulois en était encore plus différent, à en juger par la langue plus approchante de la vraie gauloise, qui est celle du

    Leihniz fait allusion. Parmi ses ouvrages, le seul qui ait rapport à la philosophie est intitulé : Aristotetis et Platonis Græcorum interpretum brevis conspectus, Paris, 1657, in-fo. C’était le préambule d’un grand ouvrage qu’il méditait sous ce titre : Athenæum philosophicum. P. J.

  1. Schilter (John), jurisconsulte et archéologue allemand, professeur de droit à Strasbourg, auteur du Thesaurus antiquitatum Teutonicarum. P. J.