Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/563

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme possibles parce que ces décrets libres sont les principales sources des existences ou faits ; au lieu que les essences sont dans l’entendement divin avant la considération de la volonté.

Cela nous servira mieux pour entendre tout le reste et pour satisfaire aux difficultés qui semblent encore rester dans mon explication ; car c’est ainsi que vous continuez, Monsieur : « Mais il me semblé qu’après cela il reste à demander, et c’est ce qui fait ma difficulté, si la liaison entre ces objets j’entends Adam et ses événements humains) est telle, d’elle-même, indépendante de tous les décrets libres de Dieu, ou si elle en est dépendante ; c’est-à-dire, si ce n’est qu’ensuite des décrets libres, par lesquels Dieu a ordonné tout ce qui leur arriverait que Dieu a connu tout ce qui leur arriverait ; ou s’il y a, indépendamment de ces décrets, entre Adam d’une part et ce qui est arrivée arrivera à lui et à sa postérité de l’autre, une connexion intrinsèque et nécessaire. Il vous paraît que je choisirai le dernier parti, parce que j’ai dit : « que Dieu a trouvé parmi les possibles un Adam accompagné de telles circonstances individuelles et qui, entre autres prédicats, a aussi celui d’avoir avec le temps une telle postérité. Or vous supposez que j’accorderai que les possibles sont possibles avant tous les décrets libres de Dieu. Supposant donc cette explication de mon sentiment suivant le dernier parti, vous jugez qu’elle a des difficultés insurmontables ; car il y a, comme vous dites avec grande raison, « une infinité d’événements humains, arrivés par des ordres très particuliers de Dieu ; comme entre autres la religion judaïque et chrétienne et surtout l’incarnation du Verbe divin. Et je ne sais comment on pourrait dire que tout cela (qui est arrivé par des décrets très libres de Dieu) était enfermé dans la notion individuelle de l’Adam possible : ce qui est considéré comme possible devant avoir tout ce que l’on conçoit qu’il a sous cette notion, indépendamment des décrets divins. »

J’ai voulu rapporter exactement votre difficulté, Monsieur, et voici comment j’espère y satisfaire entièrement à votre gré même. Car il faut bien qu’elle se puisse résoudre, puisqu’on ne saurait nier qu’il n’y ait véritablement une telle notion pleine de l’Adam accompagné de tous ses prédicats et conçu comme possible, laquelle Dieu connait avant que de résoudre de le créer, comme vous venez d’accorder. Je crois donc que le dilemme de la double explication que vous proposez reçoit quelque milieu ; et que la liaison que je conçois entre