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IX
NICOLAS MACHIAVEL.

Les circonstances alors étaient aussi grandes pour l’Italie que pour l’Europe entière. L’Allemagne, la France et le pape se disputaient la péninsule. La réforme menaçait le saint-siége. Savonarole proclamait l’avénement de la démocratie. Les Médicis, expulsés de Florence par le parti populaire, conspiraient pour ressaisir le pouvoir. L’idée de l’unité italienne, cette unité que Machiavel eut la gloire de formuler le premier, agitait sourdement les esprits, tandis que les vieux partis guelfe et gibelin travaillaient par la ruse, et au besoin par le crime, à la restauration du sacerdoce ou de l’empire. Les événements marchaient comme dans la tragédie antique ; et si Machiavel, placé sur le champ de bataille, ne sut pas toujours apprécier sûrement les péripéties du combat, il ressentit du moins cet ébranlement profond que les grandes crises impriment aux grands esprits. Employé du gouvernement de Florence, homme public ou privé, il reste toujours au second rang ; penseur, il marche à la tête de son siècle ; et, pour le juger sûrement, il faut distinguer en lui l’homme de l’écrivain.

Comme écrivain, il constitue une science nouvelle, celle de la politique, et dans cette science il résume tout l’esprit de la renaissance ; comme homme, il vit simplement, ignorant pour ainsi dire son génie, car ce n’est qu’à l’âge de quarante-quatre ans qu’il écrit son premier Traité, comme une simple confidence ou comme une requête, adressée à un protecteur ou à un ami. Sa vie s’écoule

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