Page:A. Challamel.- Les Clubs contre-révolutionnaires.djvu/535

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Le parti qui considérait l’union de Louis XVI et de Marie-Antoinette comme contraire aux sentiments et aux intérêts de la France, s’augmenta parmi les courtisans. Madame Adélaïde était à la tête des mécontents : ’ce fut elle, déjà, qui avait surnommé VAuti’ickienne la fille de Marie-Thérèse arrivant à Versailles. Le comte d’Artois changea alors de rôle, devint le « thermomètre sûr de la faveur de la princesse », dont certains nobles appelaient l’entourage « canaille aristocratique ».

Ces intrigues de cour transpiraient dans le public, par suite des pamphlets répandus, par suite de l’affaire du collier et des accusations que le comte de Provence avait lancées contre la reine. Quelques années s’écoulèrent, sans grands changements dans l’attitude respective des princes et des courtisans. Lorsque la politi(jue commença de préoccuper les masses, celles-ci s’empressèrent d’adopter le surnom que des familiers du château avaient donné à Marie-Antoinette, non plus seulement à cause de la légèreté, des inconséquences, de l’amour des plaisirs que l’on reprochait à la reine, mais pour sa conduite vis-à-vis des hommes et des choses de la Révolution. Elles prirent ce surnom en très mauvaise part et l’intligèrent comme une injure à iMarie-Antoinette, surtout lorsque circulèrent des bruits de guerre avec l’Autriche, qui soutenait les intérêts des émigrés.

Le peuple cria tous les jours, à Paris : A bas l’Autrichienne ! et il maudit V autrichianisme, à propos des réunions de princes et de courtisans qui se tenaient au château de Bagatelle et ailleurs (1). Aussi lisons ’nous, dans la (Chronique de Paris :

« Il y a eu jeudi, 10 juin 1790, une assemblée nombreuse et très secrète à Bagatelle. Toutes les portes ont été fermées. » A n’en pas douter, sous la pression des événements, Marie-Antoinette, dauphine encore ou devenue reine, et ayant reçu, en 1781, la visite de son frère Joseph II, s’enhardit et composa son entourage avec la coterie autrichienne. Elle renseigna la cour de Vienne sur les vues de celle de Versailles, éleva aux emplois, grâce à son influence sur Louis XVI, des hommes déférents à l’Autriche, et bientôt orienta la politique du gouvernement français dans le sens des intérêts autrichiens. Elle écrivit à Marie-Thérèse, le 5 mai 1778, que « c’était l’affaire la plus importante de sa vie (2) ». Elle fut bientôt l’âme de tous (1) Voir plus bas, Réuniuns de Da{/atelle et de Bellevite. (2) DArnoth et Geffroy, Murie-Anluinelte, t. 111, p. 199.