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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

cuivre ou en vermeil, des selles d’apparat, enfin, tout ce qui pouvait rehausser l’éclat de notre petite entrée triomphale. Quant à moi, après m’être baigné dans un ruisseau voisin, je mis un turban blanc, des babouches rouges, un pantalon blanc à la mamelouk, une ceinture de soie rayée, et enfin une toge que j’étais loin encore de savoir porter avec aisance. Les chefs se mirent en selle ; les soldats, déposant leurs toges, se rangèrent en masse derrière eux, et nous entrâmes en ville au pas gymnastique, précédés par des trompettes et des joueurs de flûte.

La nouvelle du combat avec Aceni-Deureusse, le retour du Lidj Dori et l’arrivée d’un Européen étaient des appâts plus qu’ordinaires pour la curiosité des citadins, partout avides de spectacles ; aussi, se pressaient-ils en foule sur notre passage et autour de l’habitation du Dedjazmatch, en face de laquelle notre troupe, formée en demi-cercle, s’arrêta en marquant le pas et en chantant à l’unisson un air militaire. Les chefs mirent pied à terre, prirent le Lidj Dori au milieu d’eux, et, s’avançant à quelques pas du seuil, s’inclinèrent ; le jeune prince entra seul chez son père. Un huissier vint aussitôt m’inviter à entrer aussi.

La maison du Dedjadj Guoscho, ronde et construite comme celle du Ras, était pleine de monde ; des huissiers maintenaient avec peine un espace libre, afin de permettre au Dedjazmatch, à demi couché sur son alga, dans l’alcôve en face de la porte, de voir ce qui se passait sur la place. On me fit asseoir sur un tapis étendu à terre, à la tête de l’alga ; le Lidj Dori resta debout parmi les pages de son père. Bientôt ceux de nos compagnons qui s’étaient distingués à l’affaire contre Aceni para-