Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/104

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Ces femmes soldats restent des femmes avec leurs touchantes faiblesses, et n’en sont que plus héroïques à affronter la dure vie des preux. Voici encore les femmes qui, dans Antioche assiégée, montent sur les remparts et arrosent de pierres et d’huile bouillante les Sarrasins. Voici celles qui, premières Croix-Rouges, parcourent le champ de bataille, donnant à boire aux blessés et les réconfortant d’une chaude tendresse. Voilà ces écuyères qui, faites prisonnières par les Sarrasins, furent, leur casque enlevé, reconnues femmes à leur longue chevelure blonde ; et ces trois cents guerrières commandées par « la Dame aux jambes d’or ». L’histoire des Croisées révélerait d’extraordinaires aventures, de surprenants héroïsmes. Contentons-nous d’indiquer sans pouvoir approfondir et de tirer de ces faits une conclusion qui s’impose. La législation féodale reconnaissait aux femmes la capacité militaire, et les mœurs façonnées par de fréquents exemples ne s’offusquaient nullement de voir une femme monter à cheval et faire la guerre.

Nul doute qu’à cet état d’esprit assez général encore à son époque, malgré le déclin des institutions féodales, Jeanne d’Arc n’ait dû le succès rapide de son entreprise. Les historiens de notre sainte nationale passent leur temps à critiquer ceux qui ont refusé d’abord de confier à Jeanne le commandement des armées, sans s’étonner une minute que finalement on l’en ait investie. Car c’est là le grand miracle de sa vie. Transportons en effet l’épopée de la Pucelle à l’époque contemporaine. L’hypothèse même nous paraît absurde. Pourquoi Jeanne d’Arc put-elle s’imposer comme chef de guerre ? Sans