Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/158

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tracèrent la carte du Tendre et, créant, avec la psychologie amoureuse, l’esprit de conversation, marquèrent pour deux siècles notre littérature de leur puissante empreinte ; nous reconnaîtrons que les femmes, législatrices des bienséances et reines de la république des lettres, politiciennes consommées, parfois générales, ambassadrices, tribuns, et parfaitement indépendantes en fait de leurs pères ou de leurs maris, ont, en ce siècle encore, réalisé sans le chercher les principaux articles du catéchisme féministe.

Le féminisme au dix-septième siècle : Poulain de la Barre. — Quelques-unes, et c’est d’ailleurs le petit nombre, passent à la théorie. Mlle de Montpensier gémit sur la servitude où l’institution du mariage, œuvre de la tyrannie des hommes, tient le sexe féminin. Et elle rêve d’une Thébaïde où, unis par les seuls liens de l’amitié, hommes et femmes vivraient affranchis de ces dures chaînes. « Qu’il y ait, s’écrie-t-elle, un endroit au moins dans le monde où les femmes cessent d’être esclaves ! »

Mlle de Scudéry d’autre part, si ennemie qu’elle soit des femmes savantes ne peut s’empêcher de s’élever contre l’absurde éducation communément donnée aux femmes. « Elles emploient, dit-elle, dix ans de leur vie à l’art de la danse qu’elles exerceront à peine quelques années. Mais elles auraient besoin toute leur vie d’être intelligentes et vertueuses. Et qui s’occupe de leur former le cœur et l’esprit ?… »