Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/161

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Nous sommes en 1622 ; Mlle de Gournay, ayant posé les principes, ne les développe qu’à demi et ne pousse pas la théorie féministe jusqu’à ses dernières conséquences. Mais arrive Descartes qui enseigne à n’accepter pour vrai que ce que la raison a démontré tel, et donc à démolir tous les préjugés. Et après avoir observé Précieuses et Frondeuses, après avoir admiré Mlle de Montpensier, — qui semble par son exemple l’inspiratrice de ses ouvrages, — un disciple de Descartes, Poulain de la Barre, fait du féminisme l’exposé le plus logique, le plus net et le plus complet qui ait jusqu’ici apparu, — et qui même doive apparaître, — dans les deux traités de l’Égalité des Sexes et de l’Éducation des Dames. Ouvrages qui, aux jours où le féminisme aura triomphé, seront des classiques au même titre que, dans une démocratie, l’Esprit des Lois et le Contrat social.

Poulain de la Barre, lui, rejette délibérément le fatras d’histoires et de légendes sur lequel les apologistes du sexe étayent leurs puériles démonstrations. Son seul guide, sa seule lumière, c’est la raison, la raison souveraine ; sa seule base, l’observation des faits.

Or, que nous démontre la raison ? Qu’une idée, pour universelle qu’elle soit, peut néanmoins être fausse et ne pas se justifier en droit.

Il en est ainsi du préjugé des sexes. Car, en réalité, l’analyse la plus exacte du cerveau ne nous fait apercevoir aucune différence entre celui de l’homme et celui de la femme. L’un et l’autre sont aptes à saisir la vérité ; donc l’un et l’autre ont droit à la vérité, droit à la science. Ce n’est pas, certes, Poulain de la Barre qui prendrait pour cible de ses