Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/189

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précisément celles qui se règlent par l’honnêteté naturelle et par le sentiment. Il est donc injuste d’alléguer, pour continuer de refuser aux femmes la jouissance de leurs droits naturels, des motifs qui n’ont une sorte de réalité que parce qu’elles ne jouissent pas de ces droits.

« Si on admettait contre les femmes des raisons semblables, il faudrait aussi priver du droit de cité la partie du peuple qui, vouée à des travaux sans relâche, ne peut ni acquérir des lumières ni exercer sa raison, et bientôt, de proche en proche, on ne permettrait d’être citoyens qu’aux hommes qui ont fait un cours de droit public ! »

Voilà des phrases que les féministes d’aujourd’hui devraient apprendre comme les versets de leur Bible. Car jamais on ne repoussera d’une main plus sûre, avec plus d’élégance dédaigneuse, l’un des principaux sophismes des adversaires de l’émancipation.

Mais si les femmes votent, dit-on, il faut craindre leur influence sur les hommes ; il faut craindre « qu’elles s’écartent des soins que la nature semble leur avoir réservés », autrement dit, qu’elles désertent le foyer.

Ces deux objections, qui sont bien celles qu’en 1921 encore élèvent les adversaires de l’émancipation féminine, Condorcet en fait justice définitivement. Pour l’influence des femmes sur les hommes, elle s’exerce d’autant plus qu’elle est plus cachée : plus les femmes ont été avilies par les lois, plus leur empire a été dangereux. — Les femmes arrachées au foyer : plaisanterie ! « Il n’y a qu’un petit nombre de citoyens qui puissent s’occuper des affaires