Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/307

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souffre dans ses sentiments et dans son orgueil. Au fond d’elle-même, elle revendique la liberté sans oser encore aucune manifestation extérieure ou, à plus forte raison, collective ; en Turquie, le féminisme n’est encore qu’un état d’âme.

Il est plus que cela en Égypte, où, dès la fin du dix-neuvième siècle, quelques émancipées bravent tous les préjugés pour aller poursuivre en Europe des études supérieures de médecine ou de droit et, retournées au pays, distribuent à leurs compatriotes les semences de vie ; où les femmes s’échappent du harem, soulèvent le voile et, encouragées par des pères, des époux imprégnés de culture française, acquièrent, sans trouver, elles, trop de désillusion dans un mariage mi-européanisé, une culture supérieure. En Égypte, les mœurs de loin précèdent les lois, et ces mœurs émancipent la femme, grande dame poétesse, femme de ministre occupée de hautes œuvres sociales ou fellahine peinant dans les plantations de coton.

En Perse, où la femme est loin d’être aussi avancée qu’en Égypte ou en Turquie, la révolution suscite pourtant quelque espoir, et, en août 1911, un député propose au parlement une loi établissant le suffrage féminin. Quelques féministes persanes, plus bruyantes que nombreuses, l’ont poussé à cette démarche, qui échoue d’ailleurs devant un réveil de l’esprit coranique.

Aux Indes, la situation est très complexe : la majorité des femmes reste naturellement ignorante et recluse. Et cependant, depuis de longues années, des efforts sont tentés par une minorité intelligente : missionnaires anglaises, grandes bourgeoises parsies,