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toiles[1]. À Montpellier, la veuve Gilley dirige une maison qui exporte des « perpétuanes » vers l’Espagne et l’Amérique[2].

À La Rochelle, les femmes commerçantes sont nombreuses. Plusieurs tiennent d’importantes maisons d’exportation. Celles-ci expédient des toiles ou de la draperie, d’autres se spécialisent pour l’envoi des fourrures dans les pays du Nord[3].

Le grand commerce des étoffes est celui où nous trouvons le plus fréquemment des femmes. Mais nous les voyons prendre part aussi à d’autres affaires. Quelques-unes sont marchandes de grains seules ou avec leurs maris[4]. D’autres ont eu, un peu avant la période qui nous occupe, il est vrai, une entreprise de bateaux-postes[5].

D’autres femmes s’associent pour commanditer un adjudicataire des fermes[6]. D’autres, et cela est surtout fréquent dans le Languedoc, s’associent en sous-main aux juifs pour leur permettre de tourner les lois qui les empêchent de faire concurrence aux commerçants chrétiens. Celles-ci prêtent leur maison et en font le dépôt des marchandises de ces commerçants juifs. D’autres vendent pour le compte de ces mêmes commerçants et leur prêtent leur nom pour la raison sociale[7].

Enfin, les femmes, veuves ou filles de détenteurs d’offices continuent directement ou indirectement leur gestion ou, du moins, suivant les idées en usage alors, conservent un droit de propriété sur ces offices. Une femme, la veuve d’Houry, imprimeur, figure, en 1788, parmi les agents de change du duc d’Orléans[8]. Celle-ci nomme un procureur pour gérer les affaires de son père, ancien régisseur de l’octroi d’Arras[9]. Une autre dispose de la lieutenance à la judicature de Toulon, vacante par la mort de son mari[10].

La veuve Meilhan dispose des offices de greffier en chef de la Bourse des marchands de Montpellier, de receveur des épices, de

  1. Arch. Départ., Rhône, E. 1043.
  2. Arch. Départ., Hérault, C. 2392.
  3. L’une d’elles, la veuve Pascaud, expédie en 1722, à Amsterdam, 299 peaux de martre et 264 livres de pelleterie commune. (Juridiction consulaire de La Rochelle. Arch. Départ., Charente-Inférieure.)
  4. Arch. Départ., Ardennes, B. 586.
  5. Mlle de Lapeyrière, première femme de chambre du duc d’Anjou, a établi des bateaux poste entre Agen et Clairac.
  6. Arch. Départ., Seine-et-Oise.
  7. Arch. Départ., Hérault, C. 2745.
  8. Almanach royal, 1788.
  9. Arch. Départ., Pas-de-Calais, C. 54.
  10. Arch. Départ., Isère, B. 1504.