Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/476

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Mais d’autres cahiers, au contraire, se plaignent de certains privilèges féminins, tel celui du douaire, et demandent qu’on le restreigne rigoureusement[1].

Le divorce est rarement demandé dans les cahiers. Cependant, le Tiers-État du district des Théatin et de la commune de Chelles le portent à leur programme. Mais l’un et l’autre semblent envisager surtout l’intérêt masculin. Le premier le trouve plus conforme au caractère essentiellement changeant de l’homme. L’autre veut soustraire le mari aux peines que lui causent « le dérèglement et la méchanceté d’une femme contre lesquels il n’a, dans l’état actuel des choses, de secours qu’en la violence qui l’expose aux sévérités de la justice »[2].

C’est plus également la pensée du bien public que le sort misérable des femmes qui languissent hors du mariage qui inspire aux merciers-drapiers d’Orléans leur proposition de loi contre les célibataires qui, suivant eux, devraient être « astreints à une double capitation »[3].

Aucune pensée féministe n’inspire les rédacteurs des cahiers et la meilleure preuve que presque personne ne songe parmi eux à donner aux femmes une influence politique, est l’insistance avec laquelle un grand nombre appellent l’attention sur la nécessité de maintenir dans toute sa force la loi salique, comme l’une des bases de la monarchie et de l’État.

Ce vœu part des régions les plus diverses et des rangs de la noblesse comme de ceux du Tiers-État. Il se trouvé dans les cahiers de la Provence comme dans ceux de l’Orléanais, de la Champagne, du Barrois, du Bourbonnais, de la Bretagne, de la Normandie, de la Picardie[4]. L’attachement à la loi salique est tellement fort qu’il semble prévaloir même contre le principe de la monarchie héréditaire, alors pourtant universellement accepté. « Les femmes,

  1. Cahier de Bernon (sénéchaussée de Troyes).
  2. Cahier de la commune de Chelles.
  3. Cahiers du bailliage d’Orléans. Cahiers des merciers-drapiers de la ville d’Orléans.
  4. « La France sera une monarchie héréditaire de mâle au mâle. » (Cahier du district des Blancs Manteaux et Cahier général du Tiers de Paris).

    « … Les États Généraux sanctionneront la loi salique » (Cahier de Chelles).
    « Les filles seront exclues du droit à la couronne " (noblesse de Château-Thierry).
    « Les femelles seront exclues du trône » (Bourbonnais).

    « La loi salique sera confirmée » (Cahier de la ville de Brest). « Les filles seront exclues du trône » (Noblesse du bailliage de Caen ; Tiers-État de Douai).