Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/131

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le prince de Conti. Et c’est ainsi que, réunis autour des femmes, se forment des partis d’opposition.

Cependant, la favorite assied solidement son influence, de puissants intérêts se groupent autour d’elle, elle a lié partie avec Machault et tous les réformateurs.

Vers 1748, elle est le centre du plus puissant parti qui soit à la Cour et, par la magie des grâces et des pensions, elle a rallié une grande partie de la noblesse féminine et masculine. Sa cousine, Mme d’Estrades, Mme de Brancas et la duchesse de Charost sont parmi ses soutiens les plus sûrs.

Les partis contraires, cependant, ne désarment pas.

La reine qui, peu contente de son rôle effacé, « a le regret du pouvoir et d’un crédit injuste[1] », reste hostile à la favorite et le parti dévot fonde sur elle ses espoirs. Elle est peu active, il est vrai, et son opposition est plutôt une bouderie silencieuse. Mais le dauphin et Mme de France sont, eux, plus remuants, « attachés aux mêmes principes, nourris des mêmes sentiments, représentant l’espoir des idées dont la reine figurait la défaite et la résignation[2] ». C’est entre le parti de la favorite et les partis dévots une guerre acharnée. Mme de Gontaut, Mme de Tencin et l’entourage de la reine soulèvent contre Mme de Pompadour une guerre de chansons et de pamphlets. Maurepas, convaincu de faire partie de la cabale et d’être l’auteur des épigrammes les plus cruelles contre Mme de Pompadour, est exilé dans sa terre de Bourges. Vainement, sur la convocation de la maréchale de Duras, Mesdames, le dauphin et un grand nombre de femmes ont tenu une assemblée plénière. Elles n’ont pu sauver le ministre.

La guerre de chansons n’ayant pas réussi, on emploie contre la favorite un autre moyen : détourner la faveur royale vers une autre maîtresse. Et les femmes du parti Tencin et Noailles se proposent de jeter dans les bras du roi Mme de la Mark, puis la princesse de Robecq.

Ces tentatives restant sans succès, les espoirs se reportent sur Mme d’Estrade, cousine de la favorite, qui a semblé plaire au roi, et bientôt Mme d’Estrade devient à son tour le leader d’un parti. Tandis que Machault continue de s’appuyer sur Mme de Pompadour, le comte d’Argenson qui, dès son arrivée au ministère, lui a été hostile, qui apparaît comme l’un des soutiens du parti dévot et qui vise le premier ministère, s’appuie sur Mme d’Estrade, qui est d’ail-

  1. D’Argenson. Loc. cit.
  2. Aubertin. L’esprit public au xviiie siècle.