Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/160

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l’Europe de 1777 à 1779. Lorsque Joseph II songea à échanger les Pays-Bas contre la Bavière et fit en ce sens des ouvertures à Charles Théodore, pour l’amener à abandonner son électorat, il fonda beaucoup d’espoir sur l’action personnelle de sa sœur auprès de Louis XVI, et Mercy Argenteau eut ordre de ne rien négliger pour l’amener à influer sur la Cour de France. D’abord indifférente, même hostile à l’ambition de sa famille, Marie-Antoinette se décida enfin à agir suivant les vues familiales. Mais sa première tentative fut fort mal accueillie. « C’est l’ambition de vos parents qui a tout bouleversé, dit le roi, ils ont commencé par la Pologne ; la Bavière fut le deuxième tome. J’en suis bien fâché pour eux et davantage pour vous. — Mais vous ne pouvez pas nier que vous n’en soyez informé et d’accord avec eux. — Je suis si peu d’accord, répliqua le roi, que l’on vient de donner ordre aux ministres français de faire connaître dans les Cours où ils se trouvent que ce démembrement se fait contre notre gré[1]. » Cette conversation est caractéristique. Elle montre un monarque bien résolu à n’écouter en rien sa femme pour la conduite des affaires. De fait Marie-Antoinette, malgré tous ses efforts et les instances pressantes de sa famille, ne parvient ni à faire triompher la politique autrichienne dans l’affaire de la succession de Bavière, ni à empêcher la France qu’elle désirait voir prête à mettre toutes ses forces dans une guerre continentale faite pour soutenir les ambitions autrichiennes, de déclarer la guerre à l’Angleterre. Elle eut beau marquer nettement sa sympathie pour l’Angleterre[2] et faire son possible pour combattre l’action de Franklin, la politique de Vergennes l’emporta. La France déclara la guerre à l’Angleterre et, dans l’affaire de la succession de Bavière, prit nettement position contre l’Autriche. La paix de Teschen consacra l’échec des plans autrichiens en Europe et celui de la politique autrichienne de la reine qui cependant fut, dès ce moment, impopulaire à ce titre auprès du peuple français.

Au cours du ministère Necker, cependant, la reine toujours écartée des affaires extérieures, conquiert peu à peu quelque influence sur l’esprit du roi. À partir de sa première grossesse et de la naissance de Madame Royale, Louis XVI prend plus de confiance en elle et la consulte plus volontiers. Son influence commence à balancer celle du comte de Maurepas jusqu’ici seul écouté.

Par l’intermédiaire de Mme  de Polignac, la reine s’est rapprochée

  1. Mercy Argenteau. Lettre à Marie-Thérèse, du 18 février 1778 (Correspondance de Mercy Argenteau).
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