Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/251

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L’insuffisance des garanties exigées, en dehors de la capitale, pour l’exercice de la profession de sage-femme, eut pour résultat l’envahissement de la profession par un grand nombre de femmes qui, sans brevet ni diplôme, ni aucune autorisation officielle, pratiquèrent l’art des accouchements et firent une grande concurrence aux sages-femmes qualifiées. Cette concurrence souleva à plusieurs reprises les protestations des maîtresses sages-femmes[1].

Mais les sages-femmes qualifiées, elles-mêmes, étaient trop peu nombreuses et trop peu compétentes pour que leur protestation put avoir du poids. L’insuffisance du nombre de sages-femmes qualifiées apparaît aux efforts tentés par le gouvernement royal et les autorités locales pour augmenter le nombre de celles-ci en encourageant par divers avantages les femmes à embrasser cette profession.

Des ordonnances royales exemptent de la corvée des femmes munies du certificat de sage-femme[2]. Les magistrats municipaux de certaines villes, suivant cet exemple, exonèrent les sages-femmes diplômées des taxes municipales (tour de ville, taille du bétail), et vont même jusqu’à leur assurer le logement[3].

Cependant, aux environs de 1770, encore l’instruction technique des sages-femmes reste bornée et leur nombre très insuffisant. On se rend compte alors des graves inconvénients que présentait cet état de choses et de la fâcheuse influence sur le développement de la natalité.

Dans les vingt années qui précèdent la Révolution, un très sérieux effort est tenté pour assurer, non seulement dans la capitale mais dans les provinces, le recrutement d’un personnel nombreux et exercé.

Les intendants encouragent les autorités locales à faire en ce sens des efforts et y travaillent eux-mêmes[4].

Pendant son intendance en Limousin, Turgot institue à Limoges des cours d’obstétrique.

Un peu auparavant (1760), l’intendant de Rennes s’occupait de faire imprimer, traduire en langue bretonne et répandre dans les campagnes un cours d’accouchements dû à M. Bonestard, médecin de Morlaix. L’œuvre était, écrivait l’intendant, d’une importance

  1. Arch. Comm., Grenoble, FF. 46. Protestation des sages-femmes de la ville contre les femmes non qualifiées qui se mêlent d’accoucher.
  2. Arch. Départ., Aube, C. 352 ; Drôme, E. 7589.
  3. Arch. Départ., Drôme, E. 7589.
  4. Ardaschef. Loc. cit.