Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/406

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les femmes sont susceptibles de toutes les qualités que la politique, la religion ou le gouvernement voudraient leur donner », après s’être élevé contre l’injustice de l’homme qui offense partout la femme, son égale par la raison, après avoir dans un large tableau, le seul qu’on ait tracé jusqu’à nos jours, de l’évolution féminine à travers les siècles, montré qu’à maintes reprises les femmes ont su être, par la force du corps et de l’esprit, et en dépit de toutes les lois restrictives, les égales des hommes, Thomas tourne brusquement, et c’est au détriment des femmes qu’il résout le problème de la différence spécifique des deux sexes.

Sans doute, la femme n’est pas inférieure à l’homme par quelques-unes des qualités les plus brillantes de l’esprit et du cœur, l’imagination semble son partage ; intuitive, elle ressent mieux que l’homme toutes les impressions, mais sans pouvoir les défendre avec force car « les images qui se pressent dans leur esprit s’ordonnent rarement en tableau »[1].

Attachant un grand prix à l’opinion publique, réfléchissant sur ce qui la fait naître, elles connaissent les hommes qu’elles jugent d’un jugement rapide et sûr, et « jouent de la société comme d’un clavecin ». Mais voulant utiliser pour des fins politiques cette connaissance pratique de l’homme, de ses faiblesses, de ses passions, elles échouent, car a il leur manque les grandes vues et l’art de distinguer les talents ». Mille exemples montrent qu’elles mêlent toujours aux grandes conceptions du gouvernement, de petites faiblesses.

Toute vertu qui repose sur des idées plus que sur des sentiments leur est normalement étrangère : épouse, mère passionnée, la femme est rarement une grande patriote ; moins encore leur convient l’amour de l’humanité.

Ce manque d’ampleur dans l’esprit, cette impuissance à s’élever au-dessus des réalités politiques, empêchent la femme d’être un génie créateur.

Mais ces différences entre l’homme et la femme viennent-elles de la nature ou de l’éducation ? Rien qu’il ne soit pas d’une netteté parfaite sur ce point, Thomas semble bien avoir cru à une différence de nature.

Il ressort d’ailleurs de son étude que, si c’est aux grandes esprits masculins surtout, seuls capables de s’élever à la hauteur de la nature, que l’humanité est redevable de ses progrès, la moyenne

  1. Thomas. Essai sur le caractère et les mœurs des femmes.