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ii. La question féminine et les cahiers des États Généraux

On ne saurait dire cependant que les efforts de tous ceux, de toutes celles qui ont attiré l’attention du public sur l’infériorité de la situation des femmes, qui ont demandé pour elles plus de justice, aient été vains. En 1788, l’opinion connaît l’existence d’une question féminine. Elle en aperçoit quelques-uns des aspects et si elle est loin de lui donner encore toute son importance, du moins soupçonne-t-elle que sa solution peut prendre place dans la série des grandes réformes qu’elle désire. Les cahiers des États Généraux de 1789 et les brochures si nombreuses qui les ont accompagnés vont nous permettre d’apercevoir jusqu’à quel point et dans quelle mesure.

Les rédacteurs des cahiers des State Généraux ont été seulement frappés par quelques faits particulièrement apparents : l’extrême ignorance de la plupart des femmes du peuple, les ravages causés chez elles par la misère et par la prostitution que celle-ci appelle. Ce sont surtout sur ces points qu’ils ont attiré l’attention des pouvoirs publics.

Les trois ordres et toutes les provinces ou presque sont unanimes à déplorer l’insuffisance des efforts faits jusqu’alors pour instruire les femmes. De la capitale comme des régions les plus diverses montent, vers le trône, les plus vives plaintes. Paris, la Champagne, la Lorraine, l’Orléanais, le Vermandois, le Cambrésis, le Boulonnais, la Normandie, l’Angoumois, l’Auvergne, la Provence donnent une place à l’instruction féminine dans leurs revendications. Cette place est d’ailleurs bien loin d’être partout la même. Paris, la Champagne, la Lorraine, l’Angoumois se préoccupent davantage de cette question que l’Orléanais, le Languedoc ou l’Auvergne ; celles-ci davantage que la Provence. La Bretagne y semble totalement indifférente[1].

  1. À Paris, et dans la région parisienne, les vœux sont très nombreux ; ils figurent dans les cahiers généraux du clergé, de la noblesse et du Tiers de Paris intra-muros et de Paris extra-muros, dans les cahiers des communes de Belleville et de Bessancourt. En Champagne, les cahiers des corporations et de Troyes, le cahier général du Tiers de Château-Thierry, de Provins le portent à leur programme. De même le Tiers du bailliage de Toul, les corporations de métier du bailliage de Bar-le-Duc, les corporations et le Tiers du bailliage