Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/496

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Il n’est donc pas étonnant que les écrivains les plus réputés, ceux qui ont eu sur la société de leur temps l’action la plus grande et l’influence la plus durable, aient proclamé la nécessité absolue de résoudre la contradiction qui était et est restée longtemps à la base des sociétés modernes, entre la condition légale de la femme et le rôle qu’elle tient effectivement dans la société. Résolus à briser les barrières artificielles que le droit romain et le droit canon avaient dressées devant les capacités féminines, ils ont proclamé l’égalité des aptitudes et des esprits, revendiqué pour la femme du peuple le droit à l’exercice d’un métier honnête, pour toutes les femmes le droit à l’instruction. Ces hardis prophètes, tel Condorcet, aperçoivent et souhaitent la femme législateur.

Une partie de ces idées déjà se cristallise dans les cahiers des États Généraux et dans les brochures d’inspiration féministe qui paraissent d’août 1788 à octobre 1789.

La République verra un magnifique déploiement d’énergies féminines, les unes vouées au service de la patrie, les autres à l’affranchissement féminin. Et les représentants les plus qualifiés de l’esprit nouveau mettront au rang de leurs préoccupations essentielles l’établissement de l’égalité, sinon encore politique, du moins familiale des deux sexes et l’élaboration d’un programme d’éducation féminine, dont la réalisation permettra à la femme de jouer son rôle d’éducatrice de la démocratie.

Ainsi, au point de vue féministe comme à tous les points de vue, le xviiie siècle prépare et explique la Révolution. Là est pour nous l’importance de l’étude que nous avons essayé d’esquisser.