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ans, Mme de La Tour d’Embleuse conservait de beaux restes de jeunesse. Ses cheveux étaient noirs, et elle avait trente-deux dents capables de broyer le pain le plus dur. Sa santé était moins florissante que sa figure, mais c’est un secret qui restait entre elle et son médecin. La duchesse touchait à cette heure dangereuse et quelquefois mortelle où la femme disparaît pour faire place à l’aïeule. Plus d’une fois elle avait été saisie par des suffocations étranges. Elle rêvait souvent que le sang la prenait à la gorge pour l’étouffer. Des chaleurs inexplicables lui montaient au cerveau par bouffées, et elle s’éveillait dans un bain de vapeur animale où elle s’étonnait de ne point mourir. Le docteur Le Bris, un jeune médecin et un vieil ami, lui recommandait un régime doux, sans fatigues et surtout sans émotions. Mais quelle âme stoïcienne aurait traversé sans s’émouvoir de si rudes épreuves ?

Le duc César de La Tour d’Embleuse, fils d’un des émigrés les plus fidèles au roi et les plus acharnés contre le pays, fut récompensé magnifiquement des services de son père. En 1827, Charles X le nomma gouverneur général de nos possessions dans l’Afrique occidentale. Il était à peine âgé de quarante ans. Pendant vingt-huit mois de séjour dans la colonie, il tint tête aux Maures et à la fièvre jaune ; puis il demanda un congé pour venir se marier à Paris. Il était riche, grâce au milliard d’indemnité ; il dou-