Page:About - Germaine.djvu/38

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mari naviguait vers les bancs de Terre-Neuve tandis qu’elle roulait sur Paris. Vous avez assisté à ses débuts, monsieur le duc ?

— Oui, morbleu ! et j’ose dire que peu de femmes ont mieux fait leur chemin. Ce n’est rien d’être jolie et d’avoir de l’esprit ; le grand art consiste à se poser en millionnaire, et c’est ainsi qu’on se fait offrir des millions.

— Elle est arrivée ici avec deux ou trois cent mille francs grappillés discrètement dans les bureaux. Elle a fait au Bois une telle poussière, que vous auriez dit que la reine de Saba venait de débarquer à Paris. En moins d’une année, elle a fait parler de ses chevaux, de ses toilettes et de son mobilier, sans qu’on pût rien dire de positif sur sa conduite. Moi qui vous parle, je lui ai donné des soins pendant dix-huit mois avant d’apercevoir le bout de l’oreille. J’aurais gardé longtemps mes illusions, si le hasard ne m’avait mis en présence de son mari. Il tomba chez elle, avec sa malle, un jour que j’y étais en visite. C’était dans les premiers jours de 1850, il y a trois ans, ou peu s’en faut. Le pauvre diable arrivait de Terre-Neuve, avec un pied de hâle sur la figure. Il repartait à la fin du mois pour une station de cinq ans dans les mers de la Chine, et il trouvait naturel d’embrasser sa femme entre les deux voyages. La livrée de ses gens lui fit cligner les yeux, et il fut ébloui des splendeurs de son mobilier. Mais,