Page:About - Le Roi des montagnes.djvu/157

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s’attendre à tout. Qui sait si vous n’essuierez pas une seconde défaite plus terrible que la première ? Comme vous n’aurez pas toujours vos jambes de vingt ans, vous pourriez tomber vivant aux mains des soldats.

— Moi !

— On vous ferait votre procès comme à un simple malfaiteur ; les magistrats ne vous craindraient plus. En pareille circonstance, un reçu de cent quinze mille francs serait une preuve accablante. Ne donnez pas d’armes à la justice contre vous. Peut-être Mme  Simons ou ses héritiers se porteraient-ils parties civiles pour revendiquer ce qui leur a été pris. Ne signez jamais de reçus ! »

Il répondit d’une voix tonnante « J’en signerai ! Et plutôt deux qu’un ! J’en signerai tant qu’on en voudra ! J’en signerai toujours, et à tout le monde. Ah ! les soldats s’imaginent qu’ils auront bon marché de moi, parce qu’une fois le hasard et le nombre leur ont donné l’avantage ! Je tomberais vivant entre leurs mains, moi dont le bras est à l’épreuve de la fatigue et la tête à l’épreuve des balles ! J’irais m’asseoir sur un banc, devant un juge, comme un paysan qui a volé des choux ! Jeune homme, vous ne connaissez pas encore Hadgi-Stavros. Il serait plus facile de déraciner le Parnès et de le planter sur la cime du Taygète, que de m’arracher de mes montagnes pour me jeter sur le banc d’un tribunal ! Écrivez-moi en grec le nom de Mme  Simons ! Bien. Le vôtre aussi !

— Il n’est pas nécessaire, et…

— Écrivez toujours. Vous savez mon nom, et je suis sûr que vous ne l’oublierez pas. Je veux avoir le vôtre, pour m’en souvenir. »

Je griffonnai mon nom comme je pus, dans la