Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/168

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dans l’histoire et qu’il a eu la durée sans la gloire. Dans votre livre, Constantin cesse d’être une énigme. Il devient un homme de son temps, dont il a les vices et les faiblesses, avec ce qu’il faut de supériorité d’esprit pour le gouverner. Venu dans un siècle qui se partageait encore entre le christianisme et le paganisme, mais qui penchait chaque jour davantage vers la loi nouvelle, Constantin devint un empereur chrétien, sans calcul et sans miracle, suivant un peu le grand nombre, mais comme font les princes qui marchent à la tête de ceux qui les poussent. — Politique avant tout, ont dit quelques auteurs. — Non, il n’a pas l’indifférence dédaigneuse qu’il faut au politique pour honorer les croyances qu’il n’a pas ou tolérer celles qu’il a désertées. Il est croyant et même superstitieux très-sincèrement. Il se fait théologien par goût, par vanité, par politique, ne voulant pas que la théologie soit étrangère à son esprit et à son pouvoir. Souvent inconséquent, souvent incertain, mais ses incertitudes ont pu passer pour des habiletés et ses contradictions l’ont sauvé des excès. Avec tout cela, empereur de race barbare, comme l’étaient déjà les empereurs depuis plus d’un siècle, peu éclairé, mais très-avisé, croyant à la force comme il appartenait à un barbare, mais demandant volontiers à ses jurisconsultes de lui faire des doctrines qui le dispensassent de recourir trop souvent à la force : et comme ce mélange de bonnes et de mauvaises qualités, toutes empruntées à son temps, n’expliquerait pas bien comment Constantin a su gouverner son siècle et fonder un empire, vous achevez de peindre le caractère de ce prince et vous nous faites comprendre son incontestable ascendant sur le présent et sur l’avenir, en reconnaissant que, a comme tous les hommes que