Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/183

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dont je parle, M. Biot dérogea à son principe. Un moment découragé de la vie scientifique par quelques amertumes que l’esprit de rivalité n’épargne à personne, devenu fermier par contre-coup et se croyant alors une vocation agricole décidée, il eut aussi l’ambition d’être maire de son village. Mal lui en prit. C’était aux derniers temps de la Restauration. La révolution de Juillet survint, et ses conseillers municipaux, déjà fort mécontents de voir appliquer les lois de l’hydraulique au régime de la pompe et du lavoir communal, estimèrent le moment propice pour se défaire d’un aussi dangereux novateur. Ils le dénoncèrent donc pour les avoir fait délibérer devant un portrait du roi Charles X, lequel n’était autre que celui de M. de Laplace en costume de Pair de France. L’administration supérieure ne s’y serait pas trompée ; mais l’administration locale crut périlleux de décourager le zèle lorsqu’elle manquait peut-être de force pour le réprimer ; elle donna donc raison aux conseillers municipaux, et M. Biot, justement puni pour cette courte infidélité à sa doctrine, déposa avec joie les insignes de son orageuse magistrature.

Dans la solitude animée qu’il s’était faite, M. Biot acceptait le travail aussi résolument qu’il repoussait la faveur. Chargé déjà du cours de physique-mathématique au collège de France, il fut nommé professeur d’astronomie à la Faculté des sciences, et bientôt après il se voyait appelé au Bureau des longitudes que présidait M. de Laplace. L’accomplissement ponctuel de tant de devoirs lui laissait toutefois, grâce à une puissance d’application qu’aucun homme n’a de nos jours portée plus loin, le loisir de concourir à la rédaction de la plupart des feuilles ouvertes alors aux discussions